One Ocean Summit : Alerte sur l’exploitation des fonds marins dans les eaux françaises
Alors que le One Ocean Summit rassemble un grand nombre de chefs d’Etats autour d’une « diplomatie bleue » instiguée par le Président de la République française, le Comité français de l’UICN souhaite alerter sur une possible exploitation minière au sein de l’espace maritime français par le biais d’une position officielle, publiée aujourd’hui.
La menace qui pèse sur grands fonds marins, un des derniers écosystèmes encore préservés de notre planète – c’est à dire la volonté d’aller y extraire des minerais – a fait beaucoup parler d’elle ces derniers jours. De nombreux scientifiques et ONG s’inquiètent en effet des conséquences de ce type d’activités industrielles sur ces habitats encore méconnus et éloignés de tout son et lumière, au développement très lent.
Cependant, l’attention semble se focaliser sur la possibilité d’extraction en dehors des espaces maritimes sous souveraineté des Etats Côtiers, appelée la « Zone » dans le jargon juridique. Or, au sein de la Zone, les velléités d’extraction sont régulées par l’Autorité Internationale des Fonds Marins, qui distribue les permis d’exploration (la France en détient deux) et travaille actuellement à la régulation des activités avec l’élaboration d’un code minier qui encadrerait l’extraction. Ce n’est cependant pas le cas au sein des espaces maritimes sous juridiction nationale, y compris au sein des eaux françaises qui pour rappel, représentent la deuxième plus grande Zone Economique Exclusive (ZEE) et plateaux continentaux du monde. Et ce notamment, grâce aux territoires d’outre-mer situés dans les trois océans, mais aussi au fait que la France a travaillé ces dernières années à étendre son plateau continental au delà des 200 milles marins : c’est ce qu’on appelle le « plateau continental étendu », qui a permis a la France de gagner 730 000 km2 d’espace maritime supplémentaire au large de la Guyane, des Antilles, de La Réunion, des Terres australes et de la Nouvelle-Calédonie. Or, le gouvernement a annoncé clairement en octobre dernier sa volonté de sécuriser les métaux stratégiques tels que le colbalt, le cuivre ou le nickel, dont recèleraient certains espaces au sein de la ZEE et du plateau français, notamment au large de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des Terres Australes françaises – qui abritent pourtant des écosystèmes marins exceptionnels et vulnérables.
Le Comité français de l’UICN, en publiant cette Position, souhaite alerter sur les dangers d’une exploitation minière au sein des eaux françaises. L’Etat possède des droits souverains sur les ressources naturelles de son sol et sous-sol, droits qui ne sont que peu encadrés par la législation française. La France, dans sa nouvelle stratégie nationale des grands fonds marins (21 janvier 2021) prône l’exploration de ces fonds, et ne cache désormais plus son ambition de les exploiter. Elle est d’ailleurs en train d’élaborer des ordonnances qui abrogeront la seule disposition du code minier français qui interdisait jusqu’ici d’exploiter les fonds marins français…
« L’exploitation des derniers écosystèmes encore non impactés par l’homme est une catastrophe environnementale annoncée. Il est urgent de réaliser ce qui est en train de se passer, et demander au gouvernement des garanties juridiques pour préserver l’espace maritime de la France, et les trésors de biodiversité qui s’y trouvent encore, avant qu’il ne soit trop tard. Compte tenu de l’étendue de son espace maritime, la France possède une responsabilité importante vis-à-vis de tous et elle doit se montrer à la hauteur de ses obligations environnementales internationales ».
Virginie Tassin Campanella, avocate en droit de la mer et experte du Comité français de l’UICN.
ll en va de la protection de ce « One Ocean », au coeur des discussions des dirigeants réunis à Brest aujourd’hui.
PLUS D’INFORMATIONS
– La position du Comité français de l’UICN sur l’exploitation des fonds marins dans les eaux françaises
– Les travaux du groupe Outre-mer
– Le One Ocean Summit